mercredi 11 février 2009

La crise, l'Europe et la concurrence


Selon le magazine l'Express, la Commission Européenne envisagerait de d'encadrer les dispositifs nationaux de soutien aux banques. Sont notamment visées les structures de défaisance pour épurer les actifs toxiques des établissements financiers. La raison invoquée ? "éviter les distorsions de concurrence et soulager le coût pour les Etats".

La strucutre de défaisance n'est pas un mécanisme nouveau - la France l'a déjà connu dans les années 1990 lors de la faillite du Crédit Lyonnais (la structure s'appelait alors le Consortium de réalisation), et le Japon y a eu massivement recours pour épurer les créances douteuses de ses banques tout au long des années 1990/début des années 2000.

Une structure ad hoc est créée pour racheter les actifs toxiques des banques pour leur permettre d'avoir des comptes sains, se reconstituer une santé et restaurer la confiance dans le système économique et ainsi financer les entreprises. Le hic, c'est le prix auquel ces actifs sont rachetés. A priori, la structure de défaisance sera créée par les Etats, et ce sera donc l'argent du contribuable qui rachèterait les actifs douteux au prix du marché. Or le prix du marché est actuellement bien plus bas qu'à l'époque où ils avaient été acheté par les banques. Ces dernières, pour redonner confiance dans leurs comptes, ont tout intérêt à les céder au prix d'achat d'origine. Si tel était le cas, les Etat supporterait la variation due à la crise... et les établissements bancaires n'assumeraient pas le poids de leurs erreurs. La Commission Européenne veut forcer les banques à vendre leurs actifs au prix actuel du marché : elle protège ainsi les contribuables, et harmonise au niveau européen les conditions de reprise des poids morts.

En Europe, les Britanniques ont été les premiers à mettre en place un mécanisme s'en rapprochant, avec des garanties des pouvoirs publics qui assurent - moyennant rémunération - les banques contre les pertes liées à leurs actifs toxiques.

Il y a donc une certaine légitimité pour l'Europe de s'impliquer dans les plans nationaux de soutien aux banques. Et pourtant, je m'étais dis "qu'est-ce que la Commission Européenne a encore à mettre son nez dans un environnement déjà pas mal compliqué à comprendre". Mais c'est vrai que c'est bien plus pratique de se retrancher derrière la complexité de la crise pour tenir Bruxelles bien à l'écart des Français...

Bref, et les pénalités pour les banques, tel qu'il est envisagé par la Commission ? Rien de moins que les restructurations. Mais restons réalistes : la Commission ne semble pas motivée par le sabordage des établissements européens "compte-tenu du caractère généralisé de la crise des banques", cite la source du magazine.

Cela illustre bien le dilemme actuel de l'Europe : oui, faisons quelque chose pour organiser la gestion de la crise financière, oui soyons créatifs, oui coordonnons-nous, mais comment ? Car il ne s'agirait pas de détruire des fleurons européens, qui constitue un des piliers de sa puissance et de son influence dans le monde. Mais cette voie ne serait-elle pas un moins de faire supporter de manière "légitime" le poids des responsabilités des banques dans la crise mondiale ? Certes, me répondrez-vous, ce ne sont pas les Européens qui sont responsables. Mais je ne suis pas d'accord pour faire payer les contribuables européens non plus.

Avez-vous des idées ?

Matthieu


2 commentaires:

Anonyme a dit…

Plein d'idées !

Mr Balladur a suggéré de mettre les dettes françaises dans une structure de défaisance pour la France, mais je préfèrerais une structure de défaisance pour tous les pays du monde. Ainsi tout le monde redémarrerait à zéro et tout le monde paierait au prorata de ses engagements anciens un montant permettant sur 40 ou 50 ans de solder la dette mondiale.

Ainsi au moment où nos chers élus se proposent de nous taxer encore plus, ils n'auraient plus d'excuses pour le faire, car les français sont parmi les plus taxés au monde pour des résultats très médiocres à tous points de vue.

Par contre, cette structure mondiale impliquerait des règles strictes pour tous les intervenants, Etats, Administrations, Elus, Collectivités, etc...à savoir qu'ils seraient taxés de 20% de leurs revenus personnels, la 1ère année de déficit, de 40% de leurs revenus la 2è année de déficit et de 60% la 3è année. C'est ainsi que le Canada a réduit sa dette colossale.

La 2è condition, c'est de réduire la fonction publique au stricte minimum comme l'ont fait les Néo-Zélandais qui sont maintenant dans les tous premiers pays au plan économique.Là où ils avaient 750000 fonctionnaires, ils sont passés à 75000. Et tout va mieux...

L'équipe de Ma crise bien aimée a dit…

Bonjour Anonyme,

Je vous remercie pour votre contribution, que je trouve très intéressante. Pour avoir vécu moi-même au Canada, je peux confirmer en partie vos propos : Ottawa a fortement licencié sa fonction publique dans les années 90, ce qui a été la raison essentielle du rééquilibrage de ses comptes. Le gouvernement fédéral s'est toutefois rendu compte au début des années 2000 des effets pervers d'une telle politique, notamment dans le secteur de la santé publique. Mais je vous rejoins sur le poids exagéré de la fonction publique française.
Quant à la structure de défaisance mondiale, je n'y crois pas, car cela nécessiterait un consensus mondial. Etant donnés les enjeux de puissance qui sont liés à la crise, je ne le pense pas réalisable. Essayons déjà de créer une telle structure européenne et voyons. Le plus simple, à mon avis, serait de commencer par un ou deux Etats, à partir desquels s'inspireraient les autres. Une méthode des "petits pas", oui, mais qui aurait l'avantage d'être concrète et plus facilement réalisable.
A très bientôt sur ma crise bien aimée !

Matthieu